
CAMEROUN/PRESIDENTIELLES 2025 : TACLES IRREGULIERS AU SEIN DU RDPC
Le temps des grandes dissensions, spectacle des plus inattendus, semble désormais révolu au sein du Rassemblement Démocratique du Peuple Camerounais (RDPC), formation politique au pouvoir au Cameroun depuis plus de quatre décennies. Cette longévité exceptionnelle à la tête de ce pays d’Afrique Centrale fait désormais face à la montée en puissance de rivalités que la seule figure centrale et unificatrice du Chef de l’Etat, également président national du RDPC, n’arrive plus à arbitrer. Pis encore, les acteurs se comportent comme s’ils avaient désormais déjà commencé à envisager la survie de leurs propres intérêts après le départ du président Paul Biya.
Si le RDPC a longtemps dominé la scène politique camerounaise par son unité d’ensemble et sa force de mobilisation, aujourd’hui ce parti politique brille par d’innombrables contradictions en haut lieu, des chevauchements de structures stratégiques, et, même des candidatures dissidentes.
Dans un éditorial publié le 8 juillet dernier dans l’organe de propagande du parti, L’Action, Christophe Mien Zok, cadre du RDPC, dresse un constat sans fard : « jamais scrutin n’aura été émaillé dans sa phase préliminaire d’autant de péripéties, de psychodrames, de coups fourrés, de manœuvres et de rebondissements en tous genres depuis des mois. »
L’éditorialiste de cette formation va encore plus loin lorsqu’il dénonce les « Trahisons, suspicions, vendettas entre camarades et petits meurtres entre amis ».
Cette cassure est apparue encore au grand jour en Juillet dernier alors que pendant les préparations de la dernière élection présidentielle, en moins de 24 heures, deux ministres — tous deux membres influents du RDPC — se sont exprimés sur la candidature du président Biya, avec des positions radicalement opposées. Le ministre de la Communication et non moins ancien SG du Comité central du RDPC, René Emmanuel Sadi, a évoqué une candidature certaine à 50% pour l’instant. Tandis que Jacques Fame Ndongo, secrétaire national à la communication du RDPC, affirmait avec assurance que « la candidature de Paul Biya ne fait aucun doute ». Une confusion médiatique inédite, à laquelle les militants comme les observateurs ont assisté, médusés.
Autre scène, autre tension, toujours au même mois de juillet, le secrétaire général de la présidence, Ferdinand Ngoh Ngoh, a lancé un comité stratégique pour préparer la campagne du président, consultant dès lors les élites régionales du parti. Problème, quelques jours plus tard, le 8 juillet, Jean Nkuete, secrétaire général du Comité central du RDPC, convoquait à son tour à Yaoundé les cadres du Centre pour le même objectif. Résultat : des responsables consultés deux fois le même jour, à quelques heures d’intervalle, par deux pôles de pouvoir qui ne semblent plus s’accorder.
Pis encore, le problème de distribution des gadgets de campagne auprès des bases militantes qui n’a pas toujours été effectif dans plusieurs localités tant en milieu urbain qu’en zone rurale. Bien plus, lesdits gadgets auraient même été vendus par des cadres, ce en contradiction avec le principe de gratuité qui a toujours guidé ces opérations. Une situation qui a renforcé le vote sanction contre le RDPC dans plusieurs bastions reconnus du parti au pouvoir.
D’après les experts, cette situation traduit un climat de faible cohésion qui fragilise progressivement le parti au pouvoir et laisse planer en interne le spectre d’un délitement sans précédent. Un peu comme si, sentant désormais le président national sur sa sortie, les cadres n’affectent plus de grands efforts à la consolidation de l’unité de cette formation politique et préfèrent laisser les bases militantes en végétation.
Une autre conséquence de cette césure dans le management politique au sein du RDPC aura été la montée en puissance des forces de l’opposition perçues davantage dans l’opinion publique comme des bouées de sauvetage que comme de véritables alternatives.
En effet, ces sempiternelles luttes au sommet, au sein du parti au pouvoir, ont eu le mérite aussi de fragiliser l’Etat et de familiariser les citoyens avec une ambiance conflictuelle nauséabonde. Elle a ainsi favorisé la montée du régime de l’impunité pour les différents lieutenants des factions rivales, mettant en spectacle un Etat en plein délitement.
Dans ces conditions, l’intervention ferme et rigoureuse du Chef de l’Etat aurait pu sonner la fin de la récréation et redorer son blason auprès de ses fidèles. Plutôt, et de façon paradoxale, ce-dernier est resté passif, presque spectateur, de ces hideuses batailles où le citoyen lambda n’a fait qu’en retenir l’impuissance du Président de la République.
A quelques heures de la publication des résultats de l’élection présidentielle du 12 octobre dernier, alors que les camerounais de tous bords s’apprêtent à recevoir le nom de celui qui présidera à leur destinée pour les sept prochaines années, le Président Paul Biya, Président national du RDPC, et favori à sa réélection, devrait pouvoir reprendre du poils de la bête pour mettre fin à ces comportements d’errance devenus une véritable menace pour la stabilité du pays.
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